dimanche 27 février 2011

La notion de terroir : l'exemple du vignoble de la Côte d'Or.

Axer sur la spécificité des terroirs de Beaune (relief, le peuplement, sa situation par rapport aux autres villes et régions, la spécificité de ses vins en terme de qualité et de quantité...)
La Bourgogne représente 3 % de la production française, 6,5 % de la production d'A.O.C en France et 0,5 % de la production mondiale (Les Chiffres Clés de la Bourgogne Viticole)
Les différents documents présentent à leur manière la notion de terroir par le biais de l'exemple du vignoble de la Côte d'Or. En effet, le document n°1 est une carte détaillant les différentes sortes de vignoble et leur production en hectolitres par an. Le document n°2 rassemble différentes définitions de la notion de terroir. Le document n°3 montre une carte topographique de Beaune à l'échelle 1/50 000 e. Le document n°4 présente un ensemble de schémas illustrant de manière très simplifiée l'évolution des paysages de la Côte et de l'arrière-Côte. Sur le document n°5, figurent plusieurs plaquettes publicitaires du vignoble Bouley, vignoble de la Côte d'Or. Le document n°6 est un extrait de "Territoires, produits et identités en mutation : les Hautes-Côtes en Bourgogne viticole", un article paru dans Ruralia durant le mois d'aout 2010 et écrit par Marion Demossier. Enfin, le document n°7 représente une étiquette d'une bouteille de Hautes-Côtes-de-Beaune.
Cet ensemble de documents nous amène à traiter et axer notre problématique sur la spécificité des terroirs de Beaune. En effet, dans quelle mesure Beaune est un centre névralgique du commerce de vins dans le sud ? Quelle est l'influence économique nationale, internationale sur l'économie local vitivinicole bourguignon ?
Pour répondre à cette question, il est nécessaire de traiter tant l'aspect géographique [I] qu' économique [II] des côtes de Beaune.


I. L'aspect géographique des Côtes de Beaune :


La région des Hautes-Côtes de Beaune, et communément des Côtes, est située à l'Ouest du talus de la Côte d'Or aux crus célèbres et prestigieux. Ce talus court de Marsannay-la-côte à Santenay.


A. Géologie et climat des terroirs de Beaune


Le vignoble bourguignon est placé au nord de la vallée du Rhône. La vigne a besoin d'un sol fragile, non dur, peu irrigué. Le sol doit être au meilleur des cas argileux. Les facteurs climatiques jouent des rôles importants dans la production de vins, mais aussi pour leur qualité. Le terroir se définit ainsi : le terroir est "un mot [...] qui a très tôt désigné les aptitudes agronomiques particulières d'un sol, d'un ensemble de sols, d'une exposition microclimatique". Le terroir est alors entendu au sens de site (conditions géographiques initiales à l’origine d’un lieu). Toutefois, la définition de J. Lévy et M. Lussault ajoute qu'on désigne aujourd'hui par terroir "la combinaison entre un milieu local de production et de savoir-faire qui contribueraient à la nature et à la qualité d'un produit [...]" (document 2, définition 4). Ainsi, le climat est majoritairement à l'origine du terroir de Beaune tout comme d'autres facteurs physiques.
Ainsi, cinq groupes de facteurs peuvent être dégagés (altitude, exposition, protection des vents, l'influence de la couverture végétale et les lieux d'accumulation ou de dégagement de l'air froid et du brouillard à un degré près de la haute-côte selon François Legouy). Les paysages de la Côte et de l'arrière-côte ont été profondément modifiés au cours des siècles. Selon R. Montagnon et A. Gallien, la plaine a avancé sur la cuesta (côte) et a permis l'ensoleillement des vignes vers l'Est et ceci la grande majorité des journées d'ensoleillement médian (cf. document 4). Ainsi, la vigne a migré en altitude en supplantant l'arrière-côte et a trouvé une bonne exposition. Cette altitude est à nuancer, car le plateau de Beaune, du talus, est en déprise agricole. Cette migration a provoqué un changement radical de la production. En effet, lié au substratum géologique, les vins vont être plutôt fins lorsqu'on est en présence de calcaire et de marnes blanches.
À l'inverse, quand le sol est composé d'un amas d'éboullis, d'alluvions, de limons argiles et de sédiments lacustres, les vins développés seront de consommation courante à forts rendements économiques.
Mais la vigne reste t-elle une activité peuplante et source de développement local ?


B. La population de Beaune et de ses environs


La renaissance vitivinicole des Hautes-Côtes, et de la Côte d'Or plus généralement, s'est accompagnée d'un renouveau démographique. Celui-ci est arrivé quinze ans plus tard pour la Haute-Côte, après l'introduction de l'appellation et plus d'une trentaine d'années sur celle de la Côte. Ce renouveau démographique n'a pas eu la même répercussion dans tous les villages de Hautes-Côtes. Les communes avoisinant l'agglomération dijonnaise, dont Nuits Saint-Georges et Beaune, ont été les plus touchées du fait de leur abandon après l'"émigration" urbaine. D'autres villages n'ont pas voulu ouvrir leur espace d'habitat à des personnes étrangères à la région ou au département.
Ainsi, Nuits Saint-Georges et Beaune demeurent deux villes-villages semi-importantes dans le paysage de la région Rhône-Alpes comme le montre la carte topographique de Beaune (document 3). Ceci s'explique par les catégories socio-professionnelles qui se trouvent par exemple à Nuits Saint-Georges et à ses alentours. En effet, l'Insee (Institut national de statistiques et des études économiques) dénombre par ce fait 20 % et 21 % d'ouvriers respectivement autour de Nuits-Saint-Georges et à Nuits-Saint-Georges. L'autre catégorie ayant un fort pourcentage de présence territoriale sont les professions intermédiaires. Toutefois, la structure sociale est profondément marquée par la présence du secteur viticole comme le note David Brion (Le schéma de cohérence territoriale de Beaune - Nuits-Saint-Georges : sous la forte pression des aires urbaines de Dijon et de Chalon-sur-Saône).
Les villages et villes se trouvent principalement dans la plaine, à quelques rares exceptions comme le montre la carte topographique (cf. Document 3). Ceci est plus avantageux pour faire des cultures. Les grosses villes, comme Beaune ou Nuits-Saint-Georges, sont adossées au versant, à côté des vignes. Les routes, les voies de déplacement, de communication majeure sont des indices à l'explication de la répartition de certains villages.
Toutefois, il est in-envisageable de faire une approche purement géographique de Beaune sans en y présenter le ressort économique.


II. L'aspect économique des Côtes de Beaune


Selon François Legouy, "le 4 août 1961, était accordée aux vignerons du Syndicat de défense des Hautes-Côtes de Beaune et de Nuits une appellation qui couronnait de longues années d'efforts" (La "renaissance" du vignoble des Hautes-Côtes de Beaune et des Hautes-Côtes de Nuits). Ladite appellation est une AOC (appellation d'origine contrôlée). Cette dernière explique entre autre l'attractivité territoriale de la Côte d'Or.

A. L'attractivité du territoire agricole de la Côte d'Or

L'utilisation de l'AOC par les producteurs viticoles a permis un renouveau économique de cette zone de culture qui était si on peut le dire en "friche". Cette AOC accordée et le succès économique qui s'en est suivi a homogéinisé en quelque sorte les territoires d'exploitation. La reconversion du vignoble s'est faite en parallèle. Toutefois, l'attractivité territoriale est à nuancer. En effet, toutes les communes appartenant à la région des Hautes-Côtes n'ont pas bénéficié à valeur égale de cette "renaissance" du vignoble bourguignon. L'économie de ces dites communes n'est pas uniquement liée à l'exploitation des surfaces.
Le dynamisme de certains villages est centralisée autour de la politique de ses responsables ("synergie politique" et "dynamisme de ses responsables") et son ouverture au commerce vinicole. D'après M. Demossier, l'AOC permet par la suite de donner "une capacité à créer un lien au lieu, distinct et emblématique" (cf. Document 6). La région de la Côte d'Or a une richesse de production vinicole. Par exemple, rien que le vignoble Bouley produit 4 types de vin bourguignon (cf. document 5).
Pour expliquer cette attractivité territoriale, il est nécessaire de s'intéresser à la production vinicole des Côtes de Beaune. L'économie de la Côte d'Or se fonde aussi sur une production vinicole conséquente

B. La production vinicole des Côtes de Beaune.

La production vitivinicole des Côtes de Beaune est peu importante comparée aux autres régions viticoles de France. Toutefois, elle reste stable. G. Labrune, dans une présentation des vignobles français (document 1), indique que les côtes de Beaune représentent environ 70.000 hectares de surface agricole utiles plantées en vigne et 3.5 millions d'hectolitres produits par an en France. Ce qui fait relativement peu comparé au 47.3 millions d'hectolitres produits par an en France toutes catégories d'appellations confondues et à la surface viticole française estimée autour de 900.000 hectares. Néanmoins, ce qui fait la force des côtes de Beaune, ce n'est pas la quantité de vins produits, mais la qualité de ces derniers. En effet, les vins de la Côte de Beaune disposent d'appellations décernées par l'INAO. Ces vins sont classés AOC. Toutefois, certaines exploitations usent d'appellations non reconnues. Ces dernières sont là pour attirer un certain tourisme et par ce fait une économie de service (tertiaire). S'y ajoute au commerce purement vitinicole, un autre type commerce. Ceci est flagrant lorsqu'on regarde les plaquettes publicitaires du vignoble Bouley qui ne vend pas uniquement du vin, mais aussi des vacances au vert (camping à la ferme, gîte rural, week-end gratuit pour achat de 100 bouteilles) (cf. Document 5). L'AC se démarque de l'AOC (cf. document 7), car c'est une appellation régionale (Bourgogne, Bourgogne Aligoté, Bourgogne Chitry , Bourgogne Clairet ou Bourgogne Rosé, Bourgogne Côte Chalonnaise, Bourgogne Côte Saint-Jacques, Bourgogne Côte de Couchoy, Bourgogne Côte d´Auxerre, Bourgogne Grand Ordinaire ou Bourgogne Ordinaire, Bourgogne Hautes-Côtes De Beaune, Bourgogne Hautes-Côtes De Nuits, etc ...). Ces vins sont moins prestigieux de par leur appellation.

Conclusion

La Côte du Rhône est devenue une région vinicole phare en France. L'économie basée sur le vignoble est liée tant à des facteurs physiques qu'à des facteurs humains. Géologie et climat reste les facteurs principaux sans lesquels rien n'aurait pu être possible. L'installation de l'Homme a créé un commerce autour du vin. La renaissance du vignoble bourguignon, après des années d'"errance", est conjointe au renouveau démographique. La région est alors mixte de par sa population puisque différentes catégories socio-professionnelles se côtoient.
Toutefois, depuis l'ouverture à l'Europe, l'ouverture des frontières françaises, le vignoble souffre d'une certaine concurrence. Cependant, les vins italiens ou espagnols sont produits en grand nombre et n'ont pas la qualité du vin bourguignon. Pourrait concurrencer le vignoble bourguignon des vins conçus de toute pièce en laboratoire, comme l'explique Michel Rolland dans Mondovino. Néanmoins, ces vins, dont les colorants se déposeraient au fond comme un reste de tanin, ne seraient, ne sont, peut-être, que de vulgaires imitations. Ainsi, on ne met pas du vin nouveau dans de vieilles outres. 

Documents du dossier géographique :
  • Document n°1 : Les vignobles français.

Source : LABRUNE G. (2005), La géographie de la France, Nathan, collection « Repères pratiques », p.91.

  • Document n°2 : Ensemble de définitions de la notion de terroir.
Les sens divers du mot « terroir » en font un mot piège de la géographie agricole. Il s’agit à l’origine du « territoire » agricole, mais qui peut être entendu de façon très diverse : 
1) Pour certains géographes, « il importe de réserver le mot terroir à une unité physique considérée sous le rapport de l’agriculture. Ainsi un fond de vallée, un flanc de butte sont des terroirs » (M. Derruau, Précis de géographie humaine, Paris, 1961).
2) Mais il est également courant de parler de territoire irrigué, de territoire viticole…, soit d’un territoire aménagé par l’homme et qui ne doit donc pas ses qualités à la seule nature physique. On a proposé pour ce sens élargi « territoire présentant certains caractères qui le distinguent au point de vue agronomique des territoires voisins »(Commission du Lexique agraire du Comité français de Géographie).
3) Enfin, le sens le plus discuté : territoire administré par un village, exploité par une communauté rurale. Les géographes français ont tenté de remplacer en ce sens terroir par finage. Ce terme s’impose avec difficulté.
GEORGE P., VERGER F. (2000), Dictionnaire de la géographie, PUF, Paris.

1) Au sens strict, lieu défini par des qualités physiques particulières : pente, exposition, nature du sol. « Il rencontre terrouoir doulx, ulginieux [marécageux], légier, humide sans froydure, comme est Olone » (Rabelais, Le Tiers Livre, 49). De là viennent des expressions comme vin de terroir (sous-entendu, qui ne saurait être produit ailleurs qu’en ce terroir particulier), goût de terroir (goût particulier). [….]
2) Au sens large : la campagne en général, quoique renvoyant à tel « canton » en particulier, et même à un certain confinement : les produits du terroir, un accent du terroir, retrouver les valeurs du terroir. Les connotations sont tantôt laudatives, tantôt péjoratives, selon les points de 
vue et les contextes… Jadis, le mot désignait d’ailleurs un territoire 
quelconque, une contrée. 


3) En un sens particulier : certains géographes spécialistes des pays tropicaux, surtout en Afrique, emploient terroir au sens de finage ; cet usage, quoique établi, est source de confusion et devrait être évité. 

BRUNET R., FERRAS R., THERY H. (2005), Les mots de la géographie, Dictionnaire critique, Reclus-La documentation français, Paris-Montpellier.


D’abord utilisé au sens de « pays », de territoire, le terroir est un mot ancien qui a très tôt désigné les aptitudes agronomiques particulières d’un sol, d’un ensemble de sols, d’une exposition micro-climatique. Par extension, il désigne aujourd’hui la combinaison entre un milieu local de production et de savoir-faire qui contribueraient à la nature et à la qualité spécifique d’un produit, et en particulier d’un aliment. Le terroir a pris une grande importance dans les stratégies de développement local en France et en Europe, à travers la reconnaissance de dénominations géographiques, de signatures par noms de lieux. La notion fit débat dans les années 1960 entre géographes spécialistes de la France et géographes africanistes, les seconds désignant par terroir l’espace mis en valeur par une communauté rurale, en bref le finage au sens historique français. Chacun a conservé son langage.
LEVY J., LUSSAULT M. (2005), Le dictionnaire de la géographie et de l’espace des sociétés, Belin, Paris.
  • Document n°3 : Carte topographique de Beaune, les reliefs de la France, cartes-topographiques.fr
  • Document n°4 : Evolution très simplifiée des paysages de la Côte et de l’Arrière-Côte,
Schémas conçus par René Montagnon (agent ONF) et réalisés par Alain Gallien (professeur), site internet de Sciences et Vie de la Terre de l’Académie de Dijon




  • Document n°5 : Plaquettes publicitaires du Vignoble Bouley (Côte d’Or).


  • Document n°6 : Extrait de "Territoires, produits et identités en mutation : Les Hautes-Côtes en Bourgogne viticole", Marion Demossier, in revue Ruralia [en ligne], 2001-08 Varia.
La spécificité des Hautes-Côtes s’enracine donc autant dans le paysage de production que dans les manières de faire. L’AOC et la synergie politique qui l’a accompagné ont permis un développement remarquable de la région et un certain nombre d’indicateurs démographiques, économiques et sociologiques attestent aujourd’hui des transformations opérées dans l’espace villageois et régional. L’AOC et le succès économique qui lui est lié ont conduit dans une certaine mesure à une homogénéisation relative des territoires. Les Hautes-Côtes ont largement bénéficié de l’implantation d’une appellation spécifique et la reconversion du vignoble s’est faite en parallèle. À cela s’ajoute le succès économique de l’appellation dans un contexte international. Dans ce bilan, et malgré les retombées économiques engendrées par la renaissance de ce vignoble, la région des Hautes-Côtes présente toutefois un certain nombre de disparités économiques et sociales.
Ainsi, toutes les communes appartenant à la région de production des Hautes-Côtes n’ont pas bénéficié à valeur égale de la reconquête : « La dynamique de certains villages par rapport à d’autres est essentiellement liée au dynamisme de ses responsables qui ont su exploiter ces retombées, et de ses habitants, sans oublier les paramètres historiques — parfois aléatoires et souvent incontrôlables — et aussi géographiques ».
Cependant, il est indéniable que sur le plan des représentations collectives, l’AOC a contribué à remodeler l’identité d’un espace en crise : « Il faut savoir que l’impression que peut donner un village des Hautes-Côtes comme d’une autre région n’est pas toujours perçue de la même manière pour tout le monde. Tout étant affaire de sensibilité ou d’appréciation. Le principal pour celui qui y réside à demeure ou passagèrement est de s’y sentir bien ». Et c’est peut être là que réside le rôle essentiel de l’AOC, la capacité à créer un lien au lieu, distinct et emblématique d’une communauté cherchant à échapper au passé pour faire face à l’avenir.
  • Document n°7 : Etiquette d’une bouteille de Hautes-Côtes-de-
    Beaune.

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