dimanche 27 février 2011

Le régime présidentiel états-unien


« The President is at liberty, both in law and conscience, to be as big a man as he can ». C'est de cette formule que Woodrow Wilson pose le principe de présidentialisation du régime, une accentuation du pouvoir par la dation du pouvoir exécutif au président.
En effet, le régime présidentiel, établi en 1787, se caractérise par une séparation stricte des pouvoirs de manière organique et fonctionnelle, la constitution organisant cette séparation. Ainsi, le pouvoir législatif a le monopole de l'initiative de la loi et la pleine maitrise de la procédure législative. Le pouvoir exécutif ne peut être renversé, ceci grâce à une légitimité fondée sur l'élection du président au suffrage universel. Le chef de l'état, qu'il soit élu ou désigné de manière autoritaire, n'est pas responsable devant le corps législatif. Enfin, le pouvoir judiciaire dispose de ses propres prérogatives et ne peut être arbitré par les deux autres pouvoirs. On distingue un autre type de régime qui est le régime présidentialiste. Le présidentialisme est un exercice du pouvoir qui consiste à faire reposer la presque totalité des pouvoirs sur le président et donc amène à un totalitarisme étatique.
Le régime présidentiel permet au président d'être au centre du pouvoir exécutif et ainsi contrôler les autres pouvoirs. Le régime présidentialiste sacre le président ultime représentant de tous les pouvoirs. Mais est-ce que ces deux types de régimes peuvent être confondus ?
Pour répondre à cette question, il faut prendre le cas des États-Unis, archétype du régime présidentiel pour connaître la véritable fonction du président dans un régime tel que le régime présidentiel (I). Ceci permettra d'établir le rôle des autres institutions politiques dans l'état (II).


I/ La fonction du président au sein du régime présidentiel :


Les pouvoirs conférés au président permettent de définir son rôle dans la politique d'état. Avant d'aborder ce point, il convient de comprendre la responsabilité du chef de l'état dans l'organe exécutif.


A. Le président, « head of executive » :


« Le président , déclarait John Marshall (membre de la Chambre des représentants) en 1800, est le seul organe de la nation dans ses relations extérieures, et son seul représentant auprès des nation étrangères […]. Il possède l’ensemble du pouvoir exécutif. Il détient et dirige la force de la nation. ». Selon J. Marshall, il est l’acteur principal de la politique étrangère du pays à tous niveaux : décision et action. Le président des États-Unis est le chef de l'État américain qui représente le pouvoir exécutif. « Le pouvoir exécutif sera conféré à un président des États-Unis d'Amérique » (article 2 section 1 de la constitution américaine). Il est élu pour quatre ans au suffrage universel direct et son mandant n’est renouvelable qu’une fois. Il doit être né aux États-Unis ou y avoir séjourné pendant quatorze ans et doit être âgé de trente ans au minimum. La politique étrangère des États-Unis représente la manière de gouverner et l’attitude qu’ils adoptent envers le reste du monde. Il s’agit de la manière de définir et de mener les relations avec l’extérieur, celle-ci est destinée aux autres pays. Mais le président ne s'occupe pas que de la politique étrangère. Grâce au système de « checks and balances » (freins et contre-poids), celui-ci sélectionne les candidats aux postes gouvernementaux et leur nomination est effectuée par le Sénat. Le président est le symbole de l’unité de la Nation . Il assure la continuité et la permanence de l'État. La pratique du « Lame Duck » (le président sortant reste en fonction tandis que le président nouvellement élu organise son arrivée au pouvoir) va dans ce sens. Le président exécute les lois et peut faire des projets de loi. Mais le président n'agit pas que au niveau exécutif, il est aussi détenteur de pouvoirs qui lui assurent une assise politique.


B. Les pouvoirs du chef de l'État :


La Constitution américaine attribue un certain nombre de pouvoirs au président, lui conférant le rôle de « diplomate suprême » (Chief Diplomat). Celui-ci est le commandant en chef des armées et de la garde nationale en application de l'article 2, section 2 de la constitution américaine. Il est donc à la tête de l’armée et possède à ce titre l’initiative et la conduite des opérations militaires des États-Unis. Il a la maitrise de la diplomatie : nomme les ambassadeurs, ratifie les traités et a un rôle important dans la résolution du conflit international. Le président a le pouvoir de négocier et de conclure, sous réserve de ratification par les sénateurs, des traités. Il faut noter en outre que les présidents ont pris l’habitude de conclure des « accords en forme simplifiée » (executive agreements) qui ont valeur de traité international en droit interne américain sans en avoir la forme. Le chef de l'état dispose d'un pouvoir réglementaire d'application des lois. Il participe au processus législatif. Il approuve la proposition de loi voté par le Congrès. Il peut exercer un droit de veto de manière exprès « regular veto » si il y a désaccord avec des lois votées par le Congrès. Ce veto peut aussi présenter comme de poche « pocket veto ». La conséquence de ce dernier type de veto est le refus de signer la loi qui lui est soumise dans un délai de 10 jours précédents un ajournement du congrès. Le président n'est pas obligé de faire connaître ses raisons. Qui plus est, le veto présidentiel est difficile à surmonter.
La politisation de la haute-administration par un système de dépouille, « spoil system », permet de nommer ses proches en tant que dignitaires. Le président a le pouvoir de nomination des membres de la cour suprême.
Le président veille à l'exécution des lois, mais ce pouvoir réglementaire va au-delà de la simple exécution des lois pour déboucher, par le biais des coutumes constitutionnelles, sur un véritable pouvoir normatif. Le chef de l'état crée des normes générales et impersonnelles au moyen d'« executive orders » (décrets présidentiels) et de « rules of regulations » (proclamations). La coutume supplante la loi pour créer le droit.
Le Président signe les textes « bills » adoptés par le Congrès leur donnant ainsi force exécutoire : « acts ». Cette signature doit être donnée dans les 10 jours de la transmission du texte à la Maison-Blanche; mais le président peut s'opposer grâce à un veto exprès ou un veto de poche. Le veto exprès doit porter sur un ensemble de textes. Il ne peut être annulé que par vote de chacune des 2 chambres ceci à leur majorité.
Le président participe à l'initiative des lois grâce à deux types d'interventions :
- l'intervention indirecte : le président demande à un « Congressman » de déposer une proposition de loi rédigée par les « Services » de la Maison-Blanche.
- l'intervention directe : le président a accès au Congrès pour y lire ses messages. 3 messages doivent être prononcés par le chef de l'exécutif : le message sur l'état de l'Union, celui par lequel le président présente son projet de budget et le dernier qui permet de faire un rapport sur la situation économique des États-Unis.
Le président, grâce à un parlementarisme de couloirs, a une intervention indirecte en matière législative.
Des éléments politiques interviennent alors pour contrer les excès de pouvoir du président.


II / L'interventionnisme de l'état dans l'exercice des pouvoirs du président :


Le congrès et la cour suprême, les deux autres institutions politiques de l'état, permettent d'éviter les débordements de puissance du chef de l'état.


A. Le Congrès, organe législatif contrôlant la fonction présidentielle :


Il est le parlement fédéral. Le Congrès est constitué de 2 assemblées : la chambre des représentants et le Sénat (article 1, section 1 de la constitution américaine). Les membres de la chambre des représentants (435) sont élus au suffrage universel direct à scrutin uninominal pour un mandat de 2 ans. Cette chambre se réunit toutes les années. Le Sénat, la deuxième chambre, représente les États fédérés. Le président du Sénat est le vice-président. Les différences qui existent entre ces deux éléments constitutifs tendent à s'estomper, ceci grâce aux « lobbies ». Le Capitole dispose de plusieurs moyens d'action sur la Maison-Blanche : l'autorisation du congrès à propos de l'engagement de troupes à l'étranger, l'approbation des traités par le Sénat, les prérogatives judiciaires et extra-judiciaire des commissions (législatives ou d'enquête) du Congrès, mais surtout l'utilisation du pouvoir législatif et financier, ainsi que le pouvoir de destituer le président. Les interventions de la Maison-Blanche sont fréquentes, mais il serait abusif de qualifier le chef d'état de « Chief Legislator »; étant donné que les demandes du président se heurtent fréquemment à la force d'inertie du Congrès, surtout quand la représentation du parti du président est minoritaire dans les deux chambres. Le président accepte des modifications à un texte qu'il a proposé en échange du vote de ce texte par les députés et les sénateurs. Dans le domaine financier, le Congrès peut refuser d'accorder des crédits qui ont été sollicités. Un autre moyen d'action du congrès sur le président existe, il s'agit de la procédure d' « impeachment ». Cette procédure permet au congrès de mettre en cause la responsabilité pénale du président en vue de le destituer quand, dans l'exercice de ses fonctions, il est reconnu coupable de « trahison, concussion, ou autres crimes ou délits graves ». La chambre des représentants sur recommandation de sa commission judiciaire, accuse le chef de l'exécutif à la majorité des suffrages exprimés. Le sénat, si l'impeachment est voté, juge le président, en se prononçant sur sa culpabilité à la majorité des deux tiers de ses membres.
La cour suprême rajoute une protection de type judiciaire au contrôle du président.


B. La Cour suprême, représentant du pouvoir judiciaire :


Le pouvoir judiciaire ne se limite pas à la Cour suprême. En effet, 9 membres sont nommés à vie par le,parlement. La cour suprême est gouverné par le « Chief Justice ». Il n'y a pas de compétition pour être nommé membre de la cour suprême ce qui inclut la non-nomination par le président. Il faut donc l'accord du Sénat. Ces 9 membres doivent représenter l'ensemble de la population. La cour suprême joue un rôle politique fondamental, car celle-ci peut s'opposer au pouvoir législatif et au pouvoir exécutif. Elle constitue de facto un élément modérateur majeur. Le pouvoir de contrôle de constitutionnalité, « judicial review », qui est l'essentiel de la puissance de la Cour suprême, n'est pas explicite dans la Constitution, et la Cour se l'est vu attribué que en 1803 dans son arrêt Marbury vs Madison. Ce principe a été aussi mentionné en 1789 par Hamilton dans The Federalist Papers, texte faisant largement autorité comme interprétation de la Constitution. Le contrôle de constitutionnalité aux États-Unis se fait a posteriori, de façon concrète et diffuse. A posteriori car il se fait après l'entrée en vigueur de la loi pour éviter l'application d'une loi anti-constitutionnelle. Ce pouvoir de contrôle est concentré à un seul juge qui vérifie si la loi est bien en rapport avec la constitution. Ainsi, une loi promulguée par le président et ratifiée par le congrès par la suite doit être vérifiée par ce juge nommé. La cour suprême complète le congrès par cette fonction de contrôle.

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